LE MAP, festival sans domicile fixe


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Fidèle à son principe de fonctionnement, cette année encore le festival photo toulousain MAP investit un lieu inédit pour y installer ses cimaises. L’ancien espace municipal Croix-Baragnon, fermé au public depuis 2017, accueille la version 2019 en plein centre-ville.

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Un véritable kaléidoscope visuel forme cette onzième édition pluridisciplinaire, composé par Pierre Garrigues son président et Ulrich Lebeuf qui en assure la programmation. Photojournalisme, mode, documentaire, recherche esthétique, une petite douche écossaise vous attend au fil de la visite. Voici trois apartés parmi les quinze expositions, dans les styles très différents qui nous sont données à voir.



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Éric Bouvet, photojournaliste Français reconnu, propose ici des travaux en plusieurs lectures distinctes, dont un diaporama saisissant, montrant son immersion au sein d’un commando Russe, et nous rappelant la cruauté à laquelle l’homme peut se prêter en temps de guerre. Le défilement des photographies sont commentées par la voix poignante du photographe, nous confiant jusqu’à ses hésitations et ses doutes sur le rôle qui est le sien. En parallèle de ses commandes presse, dans la pièce voisine, une série en moyen format noir et blanc représente un travail plus personnel et réfléchi, dévoilant ça et là le quotidien de civils entourés de ruines et où la vie tente de reprendre le dessus, images rares qui laissent un goût amer dans la bouche.

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Si la petite salle plongée dans la pénombre qui héberge les collages de Robin Lopvet n’est pas des plus spacieuse, l’ambiance met en évidence ses boites lumineuses. L’artiste y documente sa résidence artistique Taïwanaise sous une forme fictionnelle et en assumant totalement l’évidence des retouches numériques. Mais c’est derrière une vitre, qu’un écran mérite l’attention. La vidéo de 45mn qui y tourne est encore plus explicite en rendant visible la progression même des images, morceaux par morceaux, sous forme d’animation mise au point par l’artiste, elle illustre le processus créatif, et nous démontre que chaque œuvre n’est qu’une construction, une organisation fragile, à l’instar de l’environnement Taïwanais, et de part cette fragilité qu'il est facile aussi de le déconstruire.

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L’environnement est aussi le centre d’intérêt de Guillaume Zuili. La mémoire urbaine qui hante les faubourgs de Los Angeles où il est le correspondant de l’agence VU depuis 2002, est retranscrite ici dans un décor écrasé de lumière et creusé d’ombres granuleuses. Réalisées pour le festival, ces épreuves argentiques uniques nous rappellent, dans notre monde gorgé d’images, une des principales définition de la photographie qui est l’empreinte ; la lumière l’inscrivant sur une matière sensible, elle-même la restituant sous forme de valeurs de gris. À travers cette matérialité, les photos de Guillaume Zuili nous permettent donc de voir maintenant ce qui a été, sans pour autant pouvoir être datées. Ce n’est pas seulement une démarche contemplative mais aussi un questionnement sur la représentation du monde, et de la place que nous y occupons.

La diversité des styles et l’esprit multi-générationnel sont clairement revendiqués par les organisateurs, compliquant un peu l’affirmation d’une identité, mais au regard de l’éclectisme de la programmation (Peter Knapp, Marie-Laure de Decker ou les représentants d’une nouvelle génération) et du chemin parcouru depuis plus de dix ans, le MAP nous réserve sûrement encore de belles surprises.  

Programme et  infos pratiques : https://map-photo.fr

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